Je te remercie de t'intéresser à ma saga fantaisie Les reliques d'Albéron Cidor. Elle se compose actuellement d'une première trilogie achevée et d'une seconde en cours d'écriture (tomes 4 et 5 déjà disponibles).
Tu peux rester sur cette page si tu souhaites lire le début de la première trilogie (extrait gratuit en libre accès).
Pour découvrir le roman dans son intégralité, je t'invite à cliquer sur le lien ci-dessous.
Bon voyage dans le Monde Magique, récemment renommé Étheria !
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Bon voyage dans le Monde Magique, récemment renommé Étheria !
Préface
Il n'existe pas suffisamment de papier sur cette terre pour y coucher tous mes souvenirs. J'habite ce monde depuis l'aube des temps et ai vécu trop de vies pour toutes les conter. J'aimerais cependant rétablir la vérité sur les événements qui ont touché mon clan, ma famille. Au début de l'Ère des Anciens, le Clan du Soleil a subi des souffrances sans nulle autre pareille. Certains chroniqueurs ont jugé bon de déconstruire l'Histoire. Bien qu'animé par l'émotion qui est la mienne, ce livre vous raconte l'Histoire telle que je l'ai vécue. Mon histoire, mon passé. Un fragment de ma très longue existence. Ne soyez pas effrayés de vous perdre dans les méandres de ma mémoire. Lisez le passé, apprenez de nos erreurs, vivez votre présent et construisez l'avenir de vos enfants. Pour vos enfants.
Azoran le Radieux
Azoran le Radieux
prologue
Au commencement, il n’y avait rien que les étoiles brillant dans un vaste univers, informe et obscur. Puis une étoile vint à surgir et mit au monde Luminaria. La Première Déesse. Les historiens la décriraient plus tard comme une jeune fille frêle, à la peau aussi pâle que la neige qui n'existait pas encore et aux cheveux blonds, étincelant comme la poussière d'une comète. L’étoile-mère s’évanouit dans l’espace, laissant la fragile Luminaria seule, toujours inconsciente. Lorsqu’elle ouvrit les yeux, deux sphères sortirent de sous ses paupières : l’une brillante et chaude, l’autre froide et d’un sombre argenté.
– Mes chers enfants, je vous appellerai Soleil et Lune. Je créé pour vous des Gardiens qui vous protégeront. Maintenant, partez.
Elle s'était exprimée en linguicus, la langue qui serait parlée dans tout le Monde Magique. Les deux premiers astres allèrent se placer dans l’espace, accompagnés de leurs Gardiens respectifs, des êtres colossaux et intemporels. Ils laissèrent dans leur sillage une myriade de nouvelles étoiles venant consteller le ciel. Lorsque Luminaria avait ouvert la bouche, une sphère transparente en était sortie. La jeune fille la nomma Vrinaa.
« Vrinaa, ma première planète », pensa-t-elle.
De cette pensée naquit la magie, une énergie pure et naturellement présente sur ladite planète et celles à venir. Satisfaite, la Déesse sourit. De ce sourire apparut la fille de Luminaria : Nacra, la Déesse de l’eau, de la vie et de la miséricorde. Une longue chevelure aussi noire que ses yeux coulait en cascade derrière sa silhouette voluptueuse. Mère et fille s’enlacèrent. De cette étreinte naquit Démétrius, Dieu de la nature et créateur de la matière. Après deux êtres féminins, le Monde Magique s'offrait une figure masculine, aux cheveux végétalisés et au regard bienveillant. Dans cet univers nouvellement éclairé, parsemé d'étoiles scintillantes mais encore froid et vide, Luminaria s'adressa aux Astres et aux Dieux :
– Allez, mes enfants. Peuplez cette planète et les suivantes des plus belles créatures. Vous les appellerez Animaux et Humains. Libre à vous de donner naissance à d'autres races, mortelles ou immortelles. La magie coulera dans le sang de la majorité de ces êtres et se transmettra de génération en génération. Puis les premiers Humains créeront leurs propres magies et vous les y aiderez. Car telle est ma volonté.
Enfin, Luminaria, gagnée par la maturité et la sagesse, ferma les yeux et devint lumière étincelante, puis trait brillant dans l’infini. Elle commença son errance à travers le Monde Magique et les autres univers, et prit le nom de Luminaria la Voyageuse. Les Dieux poursuivirent l’œuvre de leur Mère, selon son souhait. Ils créèrent à leur tour d’autres planètes, dont La Triade, et d'autres races, comme les Elfes ou encore les Angelus, bien des siècles plus tard. Même les Astres furent capables de telles prouesses...
– Mes chers enfants, je vous appellerai Soleil et Lune. Je créé pour vous des Gardiens qui vous protégeront. Maintenant, partez.
Elle s'était exprimée en linguicus, la langue qui serait parlée dans tout le Monde Magique. Les deux premiers astres allèrent se placer dans l’espace, accompagnés de leurs Gardiens respectifs, des êtres colossaux et intemporels. Ils laissèrent dans leur sillage une myriade de nouvelles étoiles venant consteller le ciel. Lorsque Luminaria avait ouvert la bouche, une sphère transparente en était sortie. La jeune fille la nomma Vrinaa.
« Vrinaa, ma première planète », pensa-t-elle.
De cette pensée naquit la magie, une énergie pure et naturellement présente sur ladite planète et celles à venir. Satisfaite, la Déesse sourit. De ce sourire apparut la fille de Luminaria : Nacra, la Déesse de l’eau, de la vie et de la miséricorde. Une longue chevelure aussi noire que ses yeux coulait en cascade derrière sa silhouette voluptueuse. Mère et fille s’enlacèrent. De cette étreinte naquit Démétrius, Dieu de la nature et créateur de la matière. Après deux êtres féminins, le Monde Magique s'offrait une figure masculine, aux cheveux végétalisés et au regard bienveillant. Dans cet univers nouvellement éclairé, parsemé d'étoiles scintillantes mais encore froid et vide, Luminaria s'adressa aux Astres et aux Dieux :
– Allez, mes enfants. Peuplez cette planète et les suivantes des plus belles créatures. Vous les appellerez Animaux et Humains. Libre à vous de donner naissance à d'autres races, mortelles ou immortelles. La magie coulera dans le sang de la majorité de ces êtres et se transmettra de génération en génération. Puis les premiers Humains créeront leurs propres magies et vous les y aiderez. Car telle est ma volonté.
Enfin, Luminaria, gagnée par la maturité et la sagesse, ferma les yeux et devint lumière étincelante, puis trait brillant dans l’infini. Elle commença son errance à travers le Monde Magique et les autres univers, et prit le nom de Luminaria la Voyageuse. Les Dieux poursuivirent l’œuvre de leur Mère, selon son souhait. Ils créèrent à leur tour d’autres planètes, dont La Triade, et d'autres races, comme les Elfes ou encore les Angelus, bien des siècles plus tard. Même les Astres furent capables de telles prouesses...
Chapitre 1.1
Un beau jour, porté par un élan de ferveur intense, le chef des Gardiens du Soleil, ces gigantesques créatures vivant en-dehors de toutes planètes, fit une offrande à l’astre-seigneur. Aucun historien ne serait capable de la décrire tant elle revêtait une beauté hors de tout ce qui avait été créé par les Dieux. Ému, le Soleil laissa tomber des larmes de feu qui roulèrent dans les mains chaudes du Gardien immortel. Les larmes incandescentes prirent alors la forme de créatures gracieuses, au corps recouvert d’un épais manteau d’écailles. Leurs dents et leurs griffes pouvaient trancher les astres et déchirer les cieux. Les Dieux les nommèrent Dragons du Soleil, Fils et Filles de l'astre-père, nés de ses larmes et animés par les magies de Feu et de Lumière. Ils vivaient paisiblement entre les mains du chef des Gardiens du Soleil.
D'autres Dragons virent le jour, si bien qu'au fil des années, les mains du Gardien devinrent trop petites pour accueillir cette grande famille. Aussi s'approcha-t-il de la planète Triade, encore inachevée, et dit :
– Fils et Filles du Soleil, il est temps pour vous de quitter votre berceau divin, car telle est ma volonté.
Alors les majestueux sauriens s'envolèrent vers la Triade. Ils atterrirent sur le continent Kambridj, qui n’était encore qu’une terre inhospitalière. Les créatures ailées crachèrent le feu et la lumière, modelant le continent et lui donnant un aspect qu'il conserverait cinq siècles durant. Aidées des Esprits de la Nature, ces entités mystérieusement apparues dès l'Ère Première, elles élevèrent les chaînes montagneuses du nord et du sud, et plantèrent les forêts au sein de plaines fertiles. Leur fantaisie se traduisit par la création d'îles dans l'Océan Septentrional qui bordait Kambridj.
Puis les Dragons virent d’autres races apparaître, dont les Humains, et décidèrent de partager Kambridj. Ils fondèrent leur propre pays : Inhoa. Certains Dragons aimaient tellement les Humains, pour une raison que nul ne pouvait expliquer, que les Dieux leur accordèrent le pouvoir de se transformer eux-mêmes en Humains. Ils cohabiteraient désormais au sein du Clan du Soleil. Parmi eux se trouvaient Jones l'Astucieux et Dame Veyana.
D'autres Dragons virent le jour, si bien qu'au fil des années, les mains du Gardien devinrent trop petites pour accueillir cette grande famille. Aussi s'approcha-t-il de la planète Triade, encore inachevée, et dit :
– Fils et Filles du Soleil, il est temps pour vous de quitter votre berceau divin, car telle est ma volonté.
Alors les majestueux sauriens s'envolèrent vers la Triade. Ils atterrirent sur le continent Kambridj, qui n’était encore qu’une terre inhospitalière. Les créatures ailées crachèrent le feu et la lumière, modelant le continent et lui donnant un aspect qu'il conserverait cinq siècles durant. Aidées des Esprits de la Nature, ces entités mystérieusement apparues dès l'Ère Première, elles élevèrent les chaînes montagneuses du nord et du sud, et plantèrent les forêts au sein de plaines fertiles. Leur fantaisie se traduisit par la création d'îles dans l'Océan Septentrional qui bordait Kambridj.
Puis les Dragons virent d’autres races apparaître, dont les Humains, et décidèrent de partager Kambridj. Ils fondèrent leur propre pays : Inhoa. Certains Dragons aimaient tellement les Humains, pour une raison que nul ne pouvait expliquer, que les Dieux leur accordèrent le pouvoir de se transformer eux-mêmes en Humains. Ils cohabiteraient désormais au sein du Clan du Soleil. Parmi eux se trouvaient Jones l'Astucieux et Dame Veyana.
Chapitre 1.2
C'était une époque prospère en Inhoa, patrie du Clan du Soleil. Les Dragons étaient installés depuis une vingtaine d'années en Inhoa, au sud-ouest du continent. Parmi eux se trouvait le vénérable Jones, fier Dragon maîtrisant la magie de Feu. On le nommait l'Astucieux pour sa grande intelligence et sa sagesse. Il était le premier chef du Clan du Soleil. Jones habitait le Château d'Or, une somptueuse demeure bâtie en U sur une butte artificielle et située sur les hauteurs de Solariàn, la plus grande ville du pays et uniquement peuplée par le clan.
Comme chaque matin, Jones se réveilla dans son lit à baldaquin. À l'acajou excessivement sculpté s'ajoutait de grands rideaux rouges rehaussés de galons d'or, assortis au mobilier de la suite seigneuriale. La fenêtre d'albâtre se laissait volontiers caresser par les rayons du jour lorsque la Dragonne Veyana ouvrit les yeux à son tour. Elle s'étira paresseusement jusqu'à croiser le regard ambré de son époux.
– As-tu toi aussi conservé ta forme humaine toute la nuit, mon amour ? lui demanda-t-elle d'une voix éraillée.
Il répondit en hochant fébrilement la tête. Les Dieux avaient accordé à leur race le don de se transformer en Humains. En revanche, garder cette forme trop longtemps requérait une quantité de magie phénoménale. Il semblait plus avisé de ne pas abuser de cette enveloppe afin de restaurer son pouvoir magique, comme le faisait le plus proche conseiller du chef, un certain Azoran, dit Le Radieux. Jones ne l'entendait point de cette oreille. Au fil des années, sa santé avait décliné, jusqu'à s'évanouir plusieurs fois par jour au milieu des leçons de magie qu'il dispensait aux Humains et aux autres Dragons de la cité.
– L'astre-père m'a fait Dragon, mais je préfère revêtir cette forme. Tu sais très bien de quoi je parle.
– Cela nous tuera, mon aimé.
Veyana avait raison et Jones en avait parfaitement conscience. Ils avaient déjà débattu moult fois à ce sujet, et le chef de clan campait à chaque fois sur ses positions. Sa fierté et son propre plaisir l'emportaient sur la raison. De son côté, Veyana ne se voyait pas demeurer Dragonne lorsque son époux était en Humain, et se transformait aussi à outrance. Son pouvoir magique semblait cependant plus grand que celui de Jones, mais encore bien inférieur à celui du conseiller Azoran, qui avait plusieurs fois refusé d'être nommé chef de clan, malgré son immense magie.
– Nos fils sont adultes à présent, reprit Jones. Et toi, ma douce, tu es plus belle que jamais. Tu recèles un plus grand pouvoir que le mien. Tu vivras encore longtemps. Azoran veillera sur toi, il me l'a promis.
– À quoi bon vivre si tu n'es plus là ? Les Dieux nous ont offert une existence de plusieurs siècles, n'aimerais-tu pas voir naître et grandir tes petits-enfants et leurs descendants ? Ne voudrais-tu pas découvrir ce que les Humains feront de nos enseignements ?
Jones enseignait, entre autres, la magie de Feu à son peuple, tandis que Veyana lui apprenait à maîtriser celle de Lumière. Bien sûr, ces magies coulaient dans les veines du clan depuis sa naissance, mais celui-ci peinait encore à en comprendre les fondements. L'Humanité en Kambridj n'en était après tout qu'à ses balbutiements. Seule la première génération d'Humains, les Patriarches et les Matriarches, était parvenue à maîtriser certaines magies sans l'aide des Dragons. La génération actuelle, celle des Anciens, donnait au contraire l'impression de devoir tout réapprendre. Jones, Veyana et Azoran s'étaient donnés pour mission de les y aider.
Veyana caressa la joue glacée de son époux, constatant que sa température avait encore chuté, comme si la lumière dispensée par l'astre-père ne l'atteignait plus. Elle se désolait de ne pouvoir convaincre Jones de revenir sur sa décision. Elle ne pouvait que se résigner, et l'attendre pour mourir.
– Azoran prendra soin de nos fils, puisque toi non plus, tu ne rencontreras jamais nos petits-enfants.
Les doigts de Veyana se figèrent sur le visage de son aimé.
– Comment as-tu deviné ?
– Ta main est plus froide qu'hier.
Veyana se blottit dans ses bras sans mot dire. Ils restèrent ainsi de longues heures durant, à observer la danse des rayons solaires dans leur chambre luxueusement meublée. Tout ce confort ne représentait rien, sinon l'inutilité de l'opulence face à l'inéluctable.
– Veux-tu bien prévenir mes élèves de mon absence ? lui demanda-t-il d'une voix rocailleuse. Vois avec Azoran pour me remplacer, à l'avenir.
Elle lui donna pour toute réponse un tendre baiser sur ses lèvres pâles, et se leva. Il la remercia d'un léger sourire avant de retourner dans le royaume des rêves, sa longue chevelure blonde masquant ses traits tirés.
Les pieds nus de Veyana foulèrent le sol de calcaire frais avant de s'arrêter devant la vasque d'ivoire servant à la toilette du matin. Elle avait elle-même récolté ce matériau blanc cassé dans le bosquet situé en bordure de la cité, quelques années auparavant. Un vieux buffle sylvestre avait consenti à lui laisser ses cornes en échange d'une vie tranquille et sans bûcheron pour détruire son habitat. Veyana ne les avait cependant récupérées qu'à la mort du noble animal, tout en maintenant l'interdiction de bûcheronnage dans le bosquet. Elle avait ensuite fait appel à des mages de Terre du pays voisin, Ristol, pour transformer les cornes en magnifique vasque.
Veyana saisit la carafe en terre cuite remplie d'eau claire, puisée dans le fleuve Écho qui traversait la cité, et la déversa nonchalamment dans la vasque. Se rincer le visage à l'eau fraîche faisait partie de ces petits bonheurs que la Dragonne enviait aux Humains. Les Dragons n'avaient guère besoin de se toiletter, car seul le temps et l'excès de magie pouvaient altérer la beauté de leur corps. Il en allait de même pour leur enveloppe humaine. À l'inverse, certains Humains jalousaient les Dragons de ne pas vieillir comme eux, mais les craignaient trop pour le montrer.
Veyana prit ensuite le temps de coiffer sa chevelure noire d'un chignon, maintenu par un assemblage complexe de multiples épingles en argent. Puis elle se vêtit d'une simple robe en soie, importée de l'Archipel Nivi, patrie des elfes des pluies, et d'un manteau blanc et or confectionné par ses couturières.
Le soldat posté devant la porte de la suite seigneuriale s'inquiétait de ne pas voir Jones sortir. Il allait être en retard à ses propres leçons qu'il donnait sur la place centrale de Solariàn.
– Seigneur Jones, dois-je faire prévenir vos étudiants que vous serez en retard ? demanda l'homme. Êtes-vous souffrant ?
La porte s'ouvrit au même instant sur la silhouette élégante de Dame Veyana.
– Une Dame n'est jamais en retard, mon cher Tibalt, ce sont les autres qui sont en avance, railla-t-elle en affichant un sourire resplendissant. Mon époux a besoin de repos. Je vais prévenir ses étudiants qu'il ne viendra pas. Dites au conseiller Azoran qu'il le remplacera dès demain.
– Il en sera fait selon vos désirs, ma Dame.
Tibalt s'inclina respectueusement, avec autant de souplesse que le lui accordait son armure en fer de mauvaise facture. En ce temps-là, les Humains n'excellaient point en forgeage. Ils avaient cependant écouté les Dragons lorsque ceux-ci les avaient encouragés à apprendre à fabriquer leur propre équipement militaire, au cas où le clan devrait prendre part à un conflit armé. Jones enseignait également l'art des combats magiques et le maniement de la lance et de l'épée. Les Dragons n'étaient point devins, mais savaient pertinemment qu'une paix durable sur un continent aussi vaste que Kambridj ne pouvait pas durer éternellement. Un jour où l'autre, une des nations qui le composaient voudrait sûrement s'étendre, quitte à verser le sang.
Dame Veyana referma la porte avant que le soldat ne puisse voir Jones endormi, mais fort affaibli. Elle demanda cependant à l'homme de veiller sur son époux comme s'il s'agissait de son propre père.
Elle arpenta ensuite les couloirs de sa demeure en saluant chaque domestique et soldat qu'elle croisait. Elle les appelait tous par leur prénom, et se trompait rarement, sauf pour Berthilde et Clothilde, les jumelles travaillant en cuisine. L'une d'elles lui proposa d'ailleurs de manger quelques fruits pour bien commencer la journée, mais Dame Veyana déclina poliment. Les étudiants attendaient déjà depuis trop longtemps.
La femme au port altier sortit dans la cour du château et prit le temps de laisser les rayons du Soleil réchauffer son visage et se refléter sur les murs peints à l'or, témoignant de la magnificence d'un peuple déjà à son apogée artistique. La brillance aveuglante n'affectait guère son regard gris acier.
Une forte brise tenta de défaire son chignon. En vain. Veyana n'était pas une simple Humaine vulnérable aux éléments. Le vent lui fit part de sa frustration en soufflant à travers la glycine-miel qui pendait élégamment le long de la grande arche servant d'entrée au domaine. Dame Veyana adorait quitter sa propriété en passant en-dessous, et sentir la fragrance sucrée de cette plante récemment découverte par les apprentis herboristes du pays, une profession essentielle au Monde Magique. Elle lui rappelait l'odeur des biscuits que mangeaient ses fils, Inh et Evelion, lorsqu'ils étaient enfants, et confectionnés avec amour par Berthilde. Ou peut-être était-ce par Clothilde ?
L'épouse du chef de clan salua les gardes postés devant l'arche, réajusta son manteau puis reprit sa forme originelle. Les soldats du château se disputaient souvent leurs tours de garde pour déterminer qui serait présent durant ce sublime spectacle. Si la forme humaine de Dame Veyana ravissait les yeux, son enveloppe draconique, elle, émerveillait les cœurs. Les étapes de sa transformation étaient toujours les mêmes. De prime abord, sa chevelure se mettait à briller de mille feux, comme si elle ne se composait plus que de rayons auroraux, illuminant la route pavée qui descendait vers la place centrale de Solariàn. Son corps s'illuminait ensuite, grandissant et changeant d'aspect, jusqu'à dépasser l'arche d'entrée. Son manteau blanc et or devenait sa peau écailleuse, tandis que sa chevelure se muait en une crinière éblouissante, sur un dos gracieux. Enfin, deux magnifiques ailes se déployaient dans son dos, faisant tomber quelques plumes blanches que les soldats s'empressaient de récolter, tel un enfant conservant un trésor. Certains n'avaient toutefois aucun scrupule à les revendre sur le marché noir. Caractéristique très rare, les ailes de Veyana n'étaient pas cartilagineuses, mais bien composées de plumes, faisant d'elle un être fort singulier. Seuls sa voix mélodieuse et ses yeux, gris et froids comme la lame d'une épée, demeuraient inchangés.
Un sentiment de liberté retrouvé, Dame Veyana s'envola vers la place centrale de la cité afin de dispenser son savoir à des étudiants avides de connaissances. Si rejoindre ce lieu d'étude depuis le Château d'Or prenait environ une heure de marche pour un simple Humain, cela ne représentait que quelques minutes pour un Dragon ailé. L'ombre majestueuse de Dame Veyana survola les premières maisons de pierre blanche et ocre, bâties au pied de la butte artificielle, avant de rapidement se confondre avec celle du chêneil. On racontait que cet arbre, aux dimensions titanesques, était le premier végétal du pays, lorsque les Dragon du Soleil s'y étaient installés. De nombreux étudiants, Humains comme Dragons, devisaient sous ses branches argentées en attendant l'arrivée de leur instructeur. Quelle ne fut pas leur surprise en voyant Dame Veyana apparaître à la place de son époux.
– Je sais que vous vous attendiez à voir le seigneur Jones. Comme vous avez dû le remarquer ces derniers temps, son état de santé ne s'améliore guère. Azoran le remplacera dès demain. Mes cours de l'après-midi sont pour le moment maintenus.
Le vent de l'inquiétude souffla sur les étudiants médusés. Leur attention se porta presque immédiatement sur deux jeunes hommes assis sur des chaises en bois ouvragé. Il ne s'agissait ni plus ni moins que des fils de Dame Veyana : Inh et son jeune frère Evelion. Tous deux nés lorsque leur mère revêtait sa forme humaine, ils étaient, de fait, Humains. Des Humains au sang draconique. Ils ne comprenaient pas pourquoi leur père s'entêtait à conserver cette forme fragile malgré les problèmes de santé que cela lui causait.
Mais c'est bien Inh qui dardait un regard dur sur sa mère. Non seulement elle avait imposé à son frère et à lui une apparence humaine alors qu'ils auraient pu naître Dragons, mais en plus de cela, il avait l'impression qu'elle abandonnait Jones à son propre sort. Evelion tenta de le retenir lorsqu'il se leva d'un bond, la colère déformant son visage déjà sévère. Il adressa un dernier regard méprisant à Veyana avant de quitter l'assemblée. Les mots demeuraient prisonniers derrière ses lèvres, closes par la rancœur.
– Mère, pardonne Inh. Tu sais comment il est... lança Evelion sur un ton sincèrement doux.
– Impétueux et têtu, comme votre père, rétorqua Dame Veyana dans un soupir. Oui, je ne le sais que trop. Je ne peux qu'espérer que la sérénité de la montagne le calmera.
Lorsque la colère s'emparait d'Inh, celui-ci préférait en effet quitter la ville pour gagner la montagne de l'ouest, le Mont Sol'Inh. Nul ne savait si l'on avait baptisé la montagne en l'honneur du jeune homme ou l'inverse.
Dame Veyana inspira longuement avant de commencer sa leçon, balayant de bien tristes pensées de son esprit. Elle aimait enseigner les sorts de Lumière aux mages nés avec cette magie. Elle donnait également des cours de morale et de linguicus. Jones, quant à lui, enseignait la maîtrise du Feu ainsi que la stratégie militaire et les arts martiaux. Son austérité contrastait avec la patience de son épouse, qui avait à cœur d'apprendre aux étudiants à apprécier ses cours plutôt qu'à les redouter. Elle était convaincue qu'un peuple instruit était un peuple libre et pacifiste. Pourquoi se battre si l'on apprend d'abord à connaître autrui ? Veyana aurait tant aimé que son propre fils le comprenne.
Comme chaque matin, Jones se réveilla dans son lit à baldaquin. À l'acajou excessivement sculpté s'ajoutait de grands rideaux rouges rehaussés de galons d'or, assortis au mobilier de la suite seigneuriale. La fenêtre d'albâtre se laissait volontiers caresser par les rayons du jour lorsque la Dragonne Veyana ouvrit les yeux à son tour. Elle s'étira paresseusement jusqu'à croiser le regard ambré de son époux.
– As-tu toi aussi conservé ta forme humaine toute la nuit, mon amour ? lui demanda-t-elle d'une voix éraillée.
Il répondit en hochant fébrilement la tête. Les Dieux avaient accordé à leur race le don de se transformer en Humains. En revanche, garder cette forme trop longtemps requérait une quantité de magie phénoménale. Il semblait plus avisé de ne pas abuser de cette enveloppe afin de restaurer son pouvoir magique, comme le faisait le plus proche conseiller du chef, un certain Azoran, dit Le Radieux. Jones ne l'entendait point de cette oreille. Au fil des années, sa santé avait décliné, jusqu'à s'évanouir plusieurs fois par jour au milieu des leçons de magie qu'il dispensait aux Humains et aux autres Dragons de la cité.
– L'astre-père m'a fait Dragon, mais je préfère revêtir cette forme. Tu sais très bien de quoi je parle.
– Cela nous tuera, mon aimé.
Veyana avait raison et Jones en avait parfaitement conscience. Ils avaient déjà débattu moult fois à ce sujet, et le chef de clan campait à chaque fois sur ses positions. Sa fierté et son propre plaisir l'emportaient sur la raison. De son côté, Veyana ne se voyait pas demeurer Dragonne lorsque son époux était en Humain, et se transformait aussi à outrance. Son pouvoir magique semblait cependant plus grand que celui de Jones, mais encore bien inférieur à celui du conseiller Azoran, qui avait plusieurs fois refusé d'être nommé chef de clan, malgré son immense magie.
– Nos fils sont adultes à présent, reprit Jones. Et toi, ma douce, tu es plus belle que jamais. Tu recèles un plus grand pouvoir que le mien. Tu vivras encore longtemps. Azoran veillera sur toi, il me l'a promis.
– À quoi bon vivre si tu n'es plus là ? Les Dieux nous ont offert une existence de plusieurs siècles, n'aimerais-tu pas voir naître et grandir tes petits-enfants et leurs descendants ? Ne voudrais-tu pas découvrir ce que les Humains feront de nos enseignements ?
Jones enseignait, entre autres, la magie de Feu à son peuple, tandis que Veyana lui apprenait à maîtriser celle de Lumière. Bien sûr, ces magies coulaient dans les veines du clan depuis sa naissance, mais celui-ci peinait encore à en comprendre les fondements. L'Humanité en Kambridj n'en était après tout qu'à ses balbutiements. Seule la première génération d'Humains, les Patriarches et les Matriarches, était parvenue à maîtriser certaines magies sans l'aide des Dragons. La génération actuelle, celle des Anciens, donnait au contraire l'impression de devoir tout réapprendre. Jones, Veyana et Azoran s'étaient donnés pour mission de les y aider.
Veyana caressa la joue glacée de son époux, constatant que sa température avait encore chuté, comme si la lumière dispensée par l'astre-père ne l'atteignait plus. Elle se désolait de ne pouvoir convaincre Jones de revenir sur sa décision. Elle ne pouvait que se résigner, et l'attendre pour mourir.
– Azoran prendra soin de nos fils, puisque toi non plus, tu ne rencontreras jamais nos petits-enfants.
Les doigts de Veyana se figèrent sur le visage de son aimé.
– Comment as-tu deviné ?
– Ta main est plus froide qu'hier.
Veyana se blottit dans ses bras sans mot dire. Ils restèrent ainsi de longues heures durant, à observer la danse des rayons solaires dans leur chambre luxueusement meublée. Tout ce confort ne représentait rien, sinon l'inutilité de l'opulence face à l'inéluctable.
– Veux-tu bien prévenir mes élèves de mon absence ? lui demanda-t-il d'une voix rocailleuse. Vois avec Azoran pour me remplacer, à l'avenir.
Elle lui donna pour toute réponse un tendre baiser sur ses lèvres pâles, et se leva. Il la remercia d'un léger sourire avant de retourner dans le royaume des rêves, sa longue chevelure blonde masquant ses traits tirés.
Les pieds nus de Veyana foulèrent le sol de calcaire frais avant de s'arrêter devant la vasque d'ivoire servant à la toilette du matin. Elle avait elle-même récolté ce matériau blanc cassé dans le bosquet situé en bordure de la cité, quelques années auparavant. Un vieux buffle sylvestre avait consenti à lui laisser ses cornes en échange d'une vie tranquille et sans bûcheron pour détruire son habitat. Veyana ne les avait cependant récupérées qu'à la mort du noble animal, tout en maintenant l'interdiction de bûcheronnage dans le bosquet. Elle avait ensuite fait appel à des mages de Terre du pays voisin, Ristol, pour transformer les cornes en magnifique vasque.
Veyana saisit la carafe en terre cuite remplie d'eau claire, puisée dans le fleuve Écho qui traversait la cité, et la déversa nonchalamment dans la vasque. Se rincer le visage à l'eau fraîche faisait partie de ces petits bonheurs que la Dragonne enviait aux Humains. Les Dragons n'avaient guère besoin de se toiletter, car seul le temps et l'excès de magie pouvaient altérer la beauté de leur corps. Il en allait de même pour leur enveloppe humaine. À l'inverse, certains Humains jalousaient les Dragons de ne pas vieillir comme eux, mais les craignaient trop pour le montrer.
Veyana prit ensuite le temps de coiffer sa chevelure noire d'un chignon, maintenu par un assemblage complexe de multiples épingles en argent. Puis elle se vêtit d'une simple robe en soie, importée de l'Archipel Nivi, patrie des elfes des pluies, et d'un manteau blanc et or confectionné par ses couturières.
Le soldat posté devant la porte de la suite seigneuriale s'inquiétait de ne pas voir Jones sortir. Il allait être en retard à ses propres leçons qu'il donnait sur la place centrale de Solariàn.
– Seigneur Jones, dois-je faire prévenir vos étudiants que vous serez en retard ? demanda l'homme. Êtes-vous souffrant ?
La porte s'ouvrit au même instant sur la silhouette élégante de Dame Veyana.
– Une Dame n'est jamais en retard, mon cher Tibalt, ce sont les autres qui sont en avance, railla-t-elle en affichant un sourire resplendissant. Mon époux a besoin de repos. Je vais prévenir ses étudiants qu'il ne viendra pas. Dites au conseiller Azoran qu'il le remplacera dès demain.
– Il en sera fait selon vos désirs, ma Dame.
Tibalt s'inclina respectueusement, avec autant de souplesse que le lui accordait son armure en fer de mauvaise facture. En ce temps-là, les Humains n'excellaient point en forgeage. Ils avaient cependant écouté les Dragons lorsque ceux-ci les avaient encouragés à apprendre à fabriquer leur propre équipement militaire, au cas où le clan devrait prendre part à un conflit armé. Jones enseignait également l'art des combats magiques et le maniement de la lance et de l'épée. Les Dragons n'étaient point devins, mais savaient pertinemment qu'une paix durable sur un continent aussi vaste que Kambridj ne pouvait pas durer éternellement. Un jour où l'autre, une des nations qui le composaient voudrait sûrement s'étendre, quitte à verser le sang.
Dame Veyana referma la porte avant que le soldat ne puisse voir Jones endormi, mais fort affaibli. Elle demanda cependant à l'homme de veiller sur son époux comme s'il s'agissait de son propre père.
Elle arpenta ensuite les couloirs de sa demeure en saluant chaque domestique et soldat qu'elle croisait. Elle les appelait tous par leur prénom, et se trompait rarement, sauf pour Berthilde et Clothilde, les jumelles travaillant en cuisine. L'une d'elles lui proposa d'ailleurs de manger quelques fruits pour bien commencer la journée, mais Dame Veyana déclina poliment. Les étudiants attendaient déjà depuis trop longtemps.
La femme au port altier sortit dans la cour du château et prit le temps de laisser les rayons du Soleil réchauffer son visage et se refléter sur les murs peints à l'or, témoignant de la magnificence d'un peuple déjà à son apogée artistique. La brillance aveuglante n'affectait guère son regard gris acier.
Une forte brise tenta de défaire son chignon. En vain. Veyana n'était pas une simple Humaine vulnérable aux éléments. Le vent lui fit part de sa frustration en soufflant à travers la glycine-miel qui pendait élégamment le long de la grande arche servant d'entrée au domaine. Dame Veyana adorait quitter sa propriété en passant en-dessous, et sentir la fragrance sucrée de cette plante récemment découverte par les apprentis herboristes du pays, une profession essentielle au Monde Magique. Elle lui rappelait l'odeur des biscuits que mangeaient ses fils, Inh et Evelion, lorsqu'ils étaient enfants, et confectionnés avec amour par Berthilde. Ou peut-être était-ce par Clothilde ?
L'épouse du chef de clan salua les gardes postés devant l'arche, réajusta son manteau puis reprit sa forme originelle. Les soldats du château se disputaient souvent leurs tours de garde pour déterminer qui serait présent durant ce sublime spectacle. Si la forme humaine de Dame Veyana ravissait les yeux, son enveloppe draconique, elle, émerveillait les cœurs. Les étapes de sa transformation étaient toujours les mêmes. De prime abord, sa chevelure se mettait à briller de mille feux, comme si elle ne se composait plus que de rayons auroraux, illuminant la route pavée qui descendait vers la place centrale de Solariàn. Son corps s'illuminait ensuite, grandissant et changeant d'aspect, jusqu'à dépasser l'arche d'entrée. Son manteau blanc et or devenait sa peau écailleuse, tandis que sa chevelure se muait en une crinière éblouissante, sur un dos gracieux. Enfin, deux magnifiques ailes se déployaient dans son dos, faisant tomber quelques plumes blanches que les soldats s'empressaient de récolter, tel un enfant conservant un trésor. Certains n'avaient toutefois aucun scrupule à les revendre sur le marché noir. Caractéristique très rare, les ailes de Veyana n'étaient pas cartilagineuses, mais bien composées de plumes, faisant d'elle un être fort singulier. Seuls sa voix mélodieuse et ses yeux, gris et froids comme la lame d'une épée, demeuraient inchangés.
Un sentiment de liberté retrouvé, Dame Veyana s'envola vers la place centrale de la cité afin de dispenser son savoir à des étudiants avides de connaissances. Si rejoindre ce lieu d'étude depuis le Château d'Or prenait environ une heure de marche pour un simple Humain, cela ne représentait que quelques minutes pour un Dragon ailé. L'ombre majestueuse de Dame Veyana survola les premières maisons de pierre blanche et ocre, bâties au pied de la butte artificielle, avant de rapidement se confondre avec celle du chêneil. On racontait que cet arbre, aux dimensions titanesques, était le premier végétal du pays, lorsque les Dragon du Soleil s'y étaient installés. De nombreux étudiants, Humains comme Dragons, devisaient sous ses branches argentées en attendant l'arrivée de leur instructeur. Quelle ne fut pas leur surprise en voyant Dame Veyana apparaître à la place de son époux.
– Je sais que vous vous attendiez à voir le seigneur Jones. Comme vous avez dû le remarquer ces derniers temps, son état de santé ne s'améliore guère. Azoran le remplacera dès demain. Mes cours de l'après-midi sont pour le moment maintenus.
Le vent de l'inquiétude souffla sur les étudiants médusés. Leur attention se porta presque immédiatement sur deux jeunes hommes assis sur des chaises en bois ouvragé. Il ne s'agissait ni plus ni moins que des fils de Dame Veyana : Inh et son jeune frère Evelion. Tous deux nés lorsque leur mère revêtait sa forme humaine, ils étaient, de fait, Humains. Des Humains au sang draconique. Ils ne comprenaient pas pourquoi leur père s'entêtait à conserver cette forme fragile malgré les problèmes de santé que cela lui causait.
Mais c'est bien Inh qui dardait un regard dur sur sa mère. Non seulement elle avait imposé à son frère et à lui une apparence humaine alors qu'ils auraient pu naître Dragons, mais en plus de cela, il avait l'impression qu'elle abandonnait Jones à son propre sort. Evelion tenta de le retenir lorsqu'il se leva d'un bond, la colère déformant son visage déjà sévère. Il adressa un dernier regard méprisant à Veyana avant de quitter l'assemblée. Les mots demeuraient prisonniers derrière ses lèvres, closes par la rancœur.
– Mère, pardonne Inh. Tu sais comment il est... lança Evelion sur un ton sincèrement doux.
– Impétueux et têtu, comme votre père, rétorqua Dame Veyana dans un soupir. Oui, je ne le sais que trop. Je ne peux qu'espérer que la sérénité de la montagne le calmera.
Lorsque la colère s'emparait d'Inh, celui-ci préférait en effet quitter la ville pour gagner la montagne de l'ouest, le Mont Sol'Inh. Nul ne savait si l'on avait baptisé la montagne en l'honneur du jeune homme ou l'inverse.
Dame Veyana inspira longuement avant de commencer sa leçon, balayant de bien tristes pensées de son esprit. Elle aimait enseigner les sorts de Lumière aux mages nés avec cette magie. Elle donnait également des cours de morale et de linguicus. Jones, quant à lui, enseignait la maîtrise du Feu ainsi que la stratégie militaire et les arts martiaux. Son austérité contrastait avec la patience de son épouse, qui avait à cœur d'apprendre aux étudiants à apprécier ses cours plutôt qu'à les redouter. Elle était convaincue qu'un peuple instruit était un peuple libre et pacifiste. Pourquoi se battre si l'on apprend d'abord à connaître autrui ? Veyana aurait tant aimé que son propre fils le comprenne.
Chapitre 1.3
Contrairement à leurs parents, Inh et son frère n'étaient pas nés Dragons, mais Humains, et ne pouvaient pas se transformer en sauriens. Plusieurs jours de marche lui étaient donc nécessaires pour se rendre au Mont Sol'Inh, parfois appelé dans les chroniques de l'époque « Mont Sérénité », tant les bonnes énergies y circulaient en abondance. Inh savait incanter ANGELUX, un sort de lévitation de Lumière qui lui aurait permis de gagner plusieurs heures de trajet. Cependant, le jeune homme de vingt-six ans n'appréciait guère employer cette magie, héritée de sa traîtresse de mère, celle qui laissait son père dépérir. Il préféra suivre la route de terre battue en marchant d'un pas vif.
À plusieurs lieues de Solariàn, il croisa des moines en chemin, venant du monastère bâti au pied du Mont Sol'Inh, et se rendant certainement en ville pour dispenser leurs connaissances en médecine.
Les Humains du Clan du Soleil avaient bâti un temple au sommet de la montagne pour remercier les Dragons et rendre hommage à l'astre-seigneur. Le clan s'y rendait lors de diverses processions et cérémonies religieuses instaurées par le maître des rites, l'un des plus hauts placés au sein du clan, après le chef et sa famille.
Inh, quant à lui, s'y réfugiait lorsqu'il désirait rester seul. Surnommé le Prince Rayonnant par un peuple qui le craignait et le respectait tout à la fois, ce solitaire et introverti fuyait souvent ses responsabilités de futur chef de clan. Il aspirait davantage à une vie de voyages à travers le continent Kambridj.
De voyages... et de conquête.
Il sentait que la vie de son père touchait à sa fin, et n'était pas prêt à prendre sa place. Hélas, Jones avait établi des lois strictes qui faisaient de lui son successeur. Cependant, Inh n'aurait jamais laissé son frère devenir chef à sa place.
Marcher en silence raviva la défiance amère qu'il éprouvait envers Evelion, six ans plus jeune que lui. Si Inh excellait surtout dans la magie de Feu, la plus brutale en ce temps-là, Evelion, quant à lui, maîtrisait le Feu et la Lumière à la perfection. Le talent naturel de son cadet rendait parfois Inh malade de jalousie. Littéralement. Cela se traduisait par une perte soudaine du goût et de l'odorat, couplée à une allergie passagère à de nombreux fruits et légumes, constituant pourtant la base de l'alimentation du clan, et importés pour la plupart du pays Ristol. Evelion répondait toujours présent dans ces cas-là, et avait à cœur de prendre soin de son aîné. Après tout, Inh était plus qu'un frère : il succéderait un jour à leur père. Evelion le respectait beaucoup.
Par le passé, la jalousie d'Inh l'avait amené à incendier les appartements d'Evelion, blessant des domestiques au passage. Jones y avait vu là un signe de sa force brute, qu'Inh parviendrait à canaliser en mûrissant. L'Astucieux en était convaincu. Mais Veyana avait douté depuis ce jour. En suivant les recommandations du maître des rites et du conseiller Azoran, elle avait déjà envisagé d'instruire Evelion dans le but de remplacer son frère, mais Jones s'y était farouchement opposé.
Sans compter qu'Inh avait l'impression d'aimer sa mère chaque jour un peu moins. Penser à tout cela énerva le prince au point qu'il évoqua sans s'en rendre compte d'épaisses flammes rougeoyantes tout autour de lui, brûlant l'herbe grasse qui bordait la route menant à la montagne.
Le Soleil et la Lune prirent tour à tour place sur le trône céleste avant l'arrivée d'Inh au pied de la montagne. Épuisé par son voyage de six jours, et sans aucune halte, il se força à sourire aux moines qui jardinaient au bord de la route, près de leur monastère, puis commença son ascension. Il repoussa les limites de la fatigue et ignora les douleurs qui couraient dans ses articulations.
Un chemin étroit et caillouteux serpentait entre les parois escarpées. Mais au moins, il n'y avait pas d'herbe à calciner. Là, Inh pouvait courir, hurler, lancer des boules de feu jusqu'à l'épuisement : il ne blesserait personne. Il voulait se convaincre que s'il s'isolait ainsi, c'était pour se défouler sans risquer de mettre la vie de ses proches en danger. Seulement, une voix intérieure l'amenait toujours à penser le contraire.
« Je ne suis pas aussi bon que tout le monde le croit. J'aime la puissance destructrice du Feu. Je désire ardemment consumer ce qui me déplaît. Prendre la tête du clan ne m'intéresse pas. C'est trop peu. Je rêverais d'être le roi d'une puissante armée et de conquérir les autres pays de Kambridj. Un continent unifié signifierait la paix. »
La paix. Un précepte de lâches. Un prétexte à la guerre. À la violence et au sang tant convoités.
Une demie-journée venait de s'écouler lorsque le Prince Rayonnant atteignit le temple éclairé par le Soleil de midi, au sommet de la montagne. Creusé et sculpté dans la roche, il abritait l'un des trésors les plus précieux du clan : la Flamme Sacrée. On racontait qu'elle brûlait depuis les premiers jours du Monde, née, à l'instar des Dragons, d'une larme de l'astre-père. La loi établie par Jones interdisait quiconque de l'éteindre, sous peine de connaître la fureur du Soleil.
Inh n'avait cure de cette loi idiote, instaurée à cause de la peur que Jones éprouvait certainement envers son propre géniteur.
Il s'enfonça dans le temple jusqu'à atteindre le sanctuaire où brûlait le sainte Flamme. Sur le côté se trouvaient un seau et un puits, lequel était relié à une portion souterraine du fleuve Écho, et qui permettait de faire ses ablutions, avant d'adresser ses prières à l'astre-seigneur. Inh remplit le seau et arrosa le brasero sculpté dans la roche. Cela ne suffit cependant pas à éteindre complètement la Flamme Sacrée, seulement à la faire vaciller et crépiter sous des nuages de vapeur. Alors qu'il remplit le seau une deuxième fois, la voix de son grand-père céleste s'éleva soudain entre les murs du temple :
– Mon enfant, pourquoi fais-tu cela ?
– Vénérable aïeul, je ne veux pas être chef de clan. Je veux régner sur un plus vaste territoire.
– Ne saurais-tu pas te contenter de la charge de ton père ?
– Par les Dieux, non ! Je rêve de conquête ! Je veux... Je veux du sang !
On ne pouvait mentir à la Flamme Sacrée. La vérité avait été extraite de force de la bouche du jeune homme. Il n'avait jamais osé prononcer ces mots à haute voix. Lever une armée afin d'envahir un pays voisin était contraire aux lois du clan, Inh le savait. Et pourtant, c'était bien là le souhait de son cœur.
La réaction du Soleil ne se fit pas attendre. Il convoqua les forces des Esprits Célestes, ces êtres supérieurs vivant dans le ciel, et de sombres nuages se formèrent au-dessus de la montagne, assombrissant l'intérieur du temple. Seule la Flamme Sacrée éclairait le visage d'Inh, tordu en un rictus mauvais.
– Comment oses-tu proférer de telles paroles ? tonna le Soleil depuis les cieux pour être entendu de tout le clan. Tu es le futur chef de ton clan, mon descendant, et tu serais prêt à renier lois et préceptes pour obtenir davantage de pouvoirs et de terres ? Tu fais honte à ta lignée !
Jamais le Soleil ne s'était adressé ainsi à quiconque. D'ordinaire, il murmurait des secrets à l'oreille de quelques élus, lorsque ceux-ci devaient prendre des décisions importantes pour le clan. Cette fois-ci, l'astre-seigneur avait clamé son courroux pour se faire entendre par tout Inhoa, comme pour avertir Solariàn et les Cités-États humaines indépendantes des intentions du jeune homme.
« Astre stupide, un peu d'eau te rafraîchira les idées. »
Inh arrosa le brasero. Il y mit tant de volonté que la flamme commençait enfin à faiblir significativement. Il recommença jusqu'à la faire mourir. Une épaisse fumée noire et rouge surgit de l'écrin rocheux et sortit par une fenêtre du temple. Inh exultait.
Soudain, le ciel rugit. Les nuages crépitèrent avant de faire tomber la foudre. Les éclairs se déversèrent dans le temple, telle une armée prête à égorger un traître. Inh érigea des murs de flammes rougeoyantes tout autour de lui, prêt à se défendre face à ces épées luminescentes. En vain. Plusieurs éclairs franchirent les murs incandescents et vinrent s'empaler dans le corps d'Inh. Sa peau se mit à briller, et il se dit que Le Rayonnant était finalement un bon surnom. Nonobstant, la foudre ne semblait pas le brûler, comme il s'y était attendu. Bien au contraire. Elle lui rappelait la douce étreinte paternelle de son enfance, lorsque Jones s'adonnait à de rares élans d'affection.
Ses yeux marrons prirent la couleur de l'aurore. Ses cheveux, courts et blonds foncés, se muèrent en une crinière étincelante. Il sentait qu'un nouveau pouvoir s'éveillait en lui, que son sang de Dragon réagissait à la foudre. Mais tout cela n'allait pas. Trop de puissance se déversait en lui, bien plus que son corps ne pouvait en contenir. Inh se résigna à relâcher ce fabuleux pouvoir qui avait tenté de le détruire.
Une colonne de lumière enflammée l'encercla et s'éleva haut dans le ciel, perforant le plafond du temple. Un fragment de chapiteau de colonne se décrocha et le heurta à la tête. Tout s'était passé si vite.
– Que cela te serve de leçon, tonna le Soleil avant de dissiper les nuages et de rendre toute sa superbe à la montagne.
Inh était étendu là, inconscient. Il ne vit pas la Flamme Sacrée reparaître, ni même l'avertissement qui se peignit sur les murs, en lettres de feu.
« Nul n'est au-dessus des lois. »
Le Soleil le défiait de toute sa splendeur.
À plusieurs lieues de Solariàn, il croisa des moines en chemin, venant du monastère bâti au pied du Mont Sol'Inh, et se rendant certainement en ville pour dispenser leurs connaissances en médecine.
Les Humains du Clan du Soleil avaient bâti un temple au sommet de la montagne pour remercier les Dragons et rendre hommage à l'astre-seigneur. Le clan s'y rendait lors de diverses processions et cérémonies religieuses instaurées par le maître des rites, l'un des plus hauts placés au sein du clan, après le chef et sa famille.
Inh, quant à lui, s'y réfugiait lorsqu'il désirait rester seul. Surnommé le Prince Rayonnant par un peuple qui le craignait et le respectait tout à la fois, ce solitaire et introverti fuyait souvent ses responsabilités de futur chef de clan. Il aspirait davantage à une vie de voyages à travers le continent Kambridj.
De voyages... et de conquête.
Il sentait que la vie de son père touchait à sa fin, et n'était pas prêt à prendre sa place. Hélas, Jones avait établi des lois strictes qui faisaient de lui son successeur. Cependant, Inh n'aurait jamais laissé son frère devenir chef à sa place.
Marcher en silence raviva la défiance amère qu'il éprouvait envers Evelion, six ans plus jeune que lui. Si Inh excellait surtout dans la magie de Feu, la plus brutale en ce temps-là, Evelion, quant à lui, maîtrisait le Feu et la Lumière à la perfection. Le talent naturel de son cadet rendait parfois Inh malade de jalousie. Littéralement. Cela se traduisait par une perte soudaine du goût et de l'odorat, couplée à une allergie passagère à de nombreux fruits et légumes, constituant pourtant la base de l'alimentation du clan, et importés pour la plupart du pays Ristol. Evelion répondait toujours présent dans ces cas-là, et avait à cœur de prendre soin de son aîné. Après tout, Inh était plus qu'un frère : il succéderait un jour à leur père. Evelion le respectait beaucoup.
Par le passé, la jalousie d'Inh l'avait amené à incendier les appartements d'Evelion, blessant des domestiques au passage. Jones y avait vu là un signe de sa force brute, qu'Inh parviendrait à canaliser en mûrissant. L'Astucieux en était convaincu. Mais Veyana avait douté depuis ce jour. En suivant les recommandations du maître des rites et du conseiller Azoran, elle avait déjà envisagé d'instruire Evelion dans le but de remplacer son frère, mais Jones s'y était farouchement opposé.
Sans compter qu'Inh avait l'impression d'aimer sa mère chaque jour un peu moins. Penser à tout cela énerva le prince au point qu'il évoqua sans s'en rendre compte d'épaisses flammes rougeoyantes tout autour de lui, brûlant l'herbe grasse qui bordait la route menant à la montagne.
Le Soleil et la Lune prirent tour à tour place sur le trône céleste avant l'arrivée d'Inh au pied de la montagne. Épuisé par son voyage de six jours, et sans aucune halte, il se força à sourire aux moines qui jardinaient au bord de la route, près de leur monastère, puis commença son ascension. Il repoussa les limites de la fatigue et ignora les douleurs qui couraient dans ses articulations.
Un chemin étroit et caillouteux serpentait entre les parois escarpées. Mais au moins, il n'y avait pas d'herbe à calciner. Là, Inh pouvait courir, hurler, lancer des boules de feu jusqu'à l'épuisement : il ne blesserait personne. Il voulait se convaincre que s'il s'isolait ainsi, c'était pour se défouler sans risquer de mettre la vie de ses proches en danger. Seulement, une voix intérieure l'amenait toujours à penser le contraire.
« Je ne suis pas aussi bon que tout le monde le croit. J'aime la puissance destructrice du Feu. Je désire ardemment consumer ce qui me déplaît. Prendre la tête du clan ne m'intéresse pas. C'est trop peu. Je rêverais d'être le roi d'une puissante armée et de conquérir les autres pays de Kambridj. Un continent unifié signifierait la paix. »
La paix. Un précepte de lâches. Un prétexte à la guerre. À la violence et au sang tant convoités.
Une demie-journée venait de s'écouler lorsque le Prince Rayonnant atteignit le temple éclairé par le Soleil de midi, au sommet de la montagne. Creusé et sculpté dans la roche, il abritait l'un des trésors les plus précieux du clan : la Flamme Sacrée. On racontait qu'elle brûlait depuis les premiers jours du Monde, née, à l'instar des Dragons, d'une larme de l'astre-père. La loi établie par Jones interdisait quiconque de l'éteindre, sous peine de connaître la fureur du Soleil.
Inh n'avait cure de cette loi idiote, instaurée à cause de la peur que Jones éprouvait certainement envers son propre géniteur.
Il s'enfonça dans le temple jusqu'à atteindre le sanctuaire où brûlait le sainte Flamme. Sur le côté se trouvaient un seau et un puits, lequel était relié à une portion souterraine du fleuve Écho, et qui permettait de faire ses ablutions, avant d'adresser ses prières à l'astre-seigneur. Inh remplit le seau et arrosa le brasero sculpté dans la roche. Cela ne suffit cependant pas à éteindre complètement la Flamme Sacrée, seulement à la faire vaciller et crépiter sous des nuages de vapeur. Alors qu'il remplit le seau une deuxième fois, la voix de son grand-père céleste s'éleva soudain entre les murs du temple :
– Mon enfant, pourquoi fais-tu cela ?
– Vénérable aïeul, je ne veux pas être chef de clan. Je veux régner sur un plus vaste territoire.
– Ne saurais-tu pas te contenter de la charge de ton père ?
– Par les Dieux, non ! Je rêve de conquête ! Je veux... Je veux du sang !
On ne pouvait mentir à la Flamme Sacrée. La vérité avait été extraite de force de la bouche du jeune homme. Il n'avait jamais osé prononcer ces mots à haute voix. Lever une armée afin d'envahir un pays voisin était contraire aux lois du clan, Inh le savait. Et pourtant, c'était bien là le souhait de son cœur.
La réaction du Soleil ne se fit pas attendre. Il convoqua les forces des Esprits Célestes, ces êtres supérieurs vivant dans le ciel, et de sombres nuages se formèrent au-dessus de la montagne, assombrissant l'intérieur du temple. Seule la Flamme Sacrée éclairait le visage d'Inh, tordu en un rictus mauvais.
– Comment oses-tu proférer de telles paroles ? tonna le Soleil depuis les cieux pour être entendu de tout le clan. Tu es le futur chef de ton clan, mon descendant, et tu serais prêt à renier lois et préceptes pour obtenir davantage de pouvoirs et de terres ? Tu fais honte à ta lignée !
Jamais le Soleil ne s'était adressé ainsi à quiconque. D'ordinaire, il murmurait des secrets à l'oreille de quelques élus, lorsque ceux-ci devaient prendre des décisions importantes pour le clan. Cette fois-ci, l'astre-seigneur avait clamé son courroux pour se faire entendre par tout Inhoa, comme pour avertir Solariàn et les Cités-États humaines indépendantes des intentions du jeune homme.
« Astre stupide, un peu d'eau te rafraîchira les idées. »
Inh arrosa le brasero. Il y mit tant de volonté que la flamme commençait enfin à faiblir significativement. Il recommença jusqu'à la faire mourir. Une épaisse fumée noire et rouge surgit de l'écrin rocheux et sortit par une fenêtre du temple. Inh exultait.
Soudain, le ciel rugit. Les nuages crépitèrent avant de faire tomber la foudre. Les éclairs se déversèrent dans le temple, telle une armée prête à égorger un traître. Inh érigea des murs de flammes rougeoyantes tout autour de lui, prêt à se défendre face à ces épées luminescentes. En vain. Plusieurs éclairs franchirent les murs incandescents et vinrent s'empaler dans le corps d'Inh. Sa peau se mit à briller, et il se dit que Le Rayonnant était finalement un bon surnom. Nonobstant, la foudre ne semblait pas le brûler, comme il s'y était attendu. Bien au contraire. Elle lui rappelait la douce étreinte paternelle de son enfance, lorsque Jones s'adonnait à de rares élans d'affection.
Ses yeux marrons prirent la couleur de l'aurore. Ses cheveux, courts et blonds foncés, se muèrent en une crinière étincelante. Il sentait qu'un nouveau pouvoir s'éveillait en lui, que son sang de Dragon réagissait à la foudre. Mais tout cela n'allait pas. Trop de puissance se déversait en lui, bien plus que son corps ne pouvait en contenir. Inh se résigna à relâcher ce fabuleux pouvoir qui avait tenté de le détruire.
Une colonne de lumière enflammée l'encercla et s'éleva haut dans le ciel, perforant le plafond du temple. Un fragment de chapiteau de colonne se décrocha et le heurta à la tête. Tout s'était passé si vite.
– Que cela te serve de leçon, tonna le Soleil avant de dissiper les nuages et de rendre toute sa superbe à la montagne.
Inh était étendu là, inconscient. Il ne vit pas la Flamme Sacrée reparaître, ni même l'avertissement qui se peignit sur les murs, en lettres de feu.
« Nul n'est au-dessus des lois. »
Le Soleil le défiait de toute sa splendeur.
Fin de l'extrait...
L'aventure continue !